Ce matin, une tempête de connaissance.
Un
buisson ou un arbre s'embrase et de proche en proche comme l'aube se
glisse sur les plaines, le soleil a surgi, la lumière a franchi les
coteaux et roulé dans la vallée et tu as sauté sur ta monture et saisi
la bride des mots, les doigts du compositeur ont entrepris leur
randonnée sur le clavier, chacun a saisi ses outils. Le saisissement
mental du rêve a permis la prise en main des outils. Il faut maintenant
traduire cette tempête de compréhension qui a fait rage à travers les
rochers et la forêt, les constructions patientes du temps, des conflits
de générations — les soucis d'engendrement, concept un peu complexe né du confinement et de La métamorphose
de Kafka dans le dernier livre de Bruno Latour, et que tu viens de
mieux comprendre. La tempête de connaissance d'abord dévastatrice
devient fleuve et rivière puis ruisseau pour te permettre d'écrire,
d'expliquer ou de raconter, ou de tisser, modeler, moduler ton chant,
ton poème ou ton conte, au romancier d'avancer son roman, autant de
manières de faire avec cette puissance d'agir qui a ses phases, ses
paroxysmes, ses oublis, ses errements, qui peut en tout point être
comparée à l'eau dans L'histoire d'un ruisseau d'Élisée Reclus,
arasant les montagnes, creusant les gouffres, édifiant les stalagtites
et stalagmites — mon crayon s'étouffe, collapse... stalactites et non
stalag... les guerres donc, les guerres ne sont pas en reste dans notre
puissance d'agir !
Ainsi la lecture, comme l'eau, passe par ses
chemins souterrains, par la nuit, par le rêve, surgit au matin dans les
mains qui saisissent le papier-crayon, écrit, raconte, remue, dépose des
sédiments...
Puis tu reviens ouvrir le livre, permettant ses résurgences nouvelles, son frais visage transformé, qui court plus loin.
Peinture de Marc Chagall, 1929
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